Article rédigé par Pierre-Antoine Rizk

Au-delà du danger qu’elle constitue pour les individus, la pandémie de coronavirus bouleverse profondément le fonctionnement des entreprises.

Celles-ci sont durement touchées par la crise sanitaire, notamment à cause du confinement imposé à tous les individus résidant sur le territoire et dont l’une des conséquences a été de réduire considérablement le dynamisme économique.

Un grand nombre d’entreprises se sont ainsi trouvées dans l’incapacité de poursuivre leurs activités en présentiel. Dans ce contexte, le recours au télétravail s’est imposé comme une nécessité.

L’observation de la pratique a permis de constater que le taux de mise en œuvre du télétravail différait en fonction des secteurs d’activité. Si les domaines de l’information et de la communication, de la banque, de l’assurance et de l’immobilier ont pu s’adapter relativement rapidement aux méthodes de télétravail, ce procédé n’a pas pu être appliqué de la même manière dans d’autres secteurs tels que la restauration, l’industrie agroalimentaire ou encore la construction, du fait de l’inadaptation évidente de ces champs d’activité au travail à distance.

Le télétravail ne peut donc concerner que certaines catégories socioprofessionnelles. De manière corrélative, l’application du télétravail est plus aisée dans les villes que dans les campagnes, la proportion d’emplois se prêtant au télétravail étant plus élevée en zones urbaines qu’en zones rurales.

Il apparaît également opportun de relever l’urgence dans laquelle le télétravail a été instauré lors du premier confinement. La survenance soudaine de l’épidémie ainsi que des mesures sanitaires qui en ont découlé ont, en effet, impliqué un recours au télétravail dans des conditions loin d’être optimales, les entreprises et les salariés n’étant pas suffisamment préparés à exercer leurs activités professionnelles de cette manière.

Dans une étude publiée en novembre 2020, la Direction générale du Trésor s’attache ainsi à relever les effets économiques du télétravail.

Quels sont ces effets ?

Une augmentation de la productivité des entreprises sur le court terme

Cette augmentation de la productivité des entreprises reposerait principalement sur l’augmentation du temps que les salariés peuvent potentiellement consacrer à leurs tâches professionnelles en période de télétravail. Celui-ci pourrait ainsi permettre une réduction, voire une suppression du temps habituellement dédié au déplacement des salariés se rendant sur le site de leur entreprise.

De plus, le télétravail permettrait aux entreprises de réduire leurs espaces de travail et, de ce fait, de se voir dispensées de dépenser des sommes faramineuses dans la location des bureaux et les frais énergétiques.

La productivité des salariés exerçant en télétravail pourrait également être réhaussée par l’amélioration de leurs conditions de travail induites par le travail à distance. Cela permettrait en effet aux employés d’être plus consciencieux dans leurs activités et de faire preuve d’un investissement supplémentaire par rapport à leurs conditions de travail habituelles.

Il importe toutefois que les conditions de travail des salariés soient effectivement améliorées par le télétravail, ce qui est loin d’être une situation universelle. En outre, un télétravail mis en œuvre de manière inadaptée ou pour des missions s’accordant difficilement avec le travail à distance risquerait d’aboutir à une baisse de la productivité des salariés.

Une modification de l’aménagement du territoire sur le long terme

La particularité du télétravail est de ne pas contraindre les salariés à se déplacer jusqu’au site de leur entreprise. Les salariés en situation de télétravail sont donc libres d’exercer leurs activités professionnelles à partir de toute zone géographique disposant d’un réseau internet suffisamment performant pour permettre la communication entre les employés et leurs entreprises.

Dès lors, le recours massif au télétravail sur le long terme permettrait aux salariés de pouvoir résider ailleurs que dans les métropoles, dont les prix des logements sont particulièrement élevés par rapport aux villes de plus faible attractivité. En ce sens, les zones non métropolitaines verraient leur attractivité renforcée en raison des nombreux salariés désireux de s’établir dans des régions plus accessibles financièrement.

De la même manière, l’essor du télétravail entraînerait le développement, déjà initié, de structures spécifiquement conçues dans l’objectif de répondre aux besoins des salariés travaillant à distance, en particulier concernant l’amélioration des conditions de travail de ces salariés. De tels établissements peuvent notamment consister en des espaces de travail partagés – ou coworking.

Cette possibilité pour les salariés de résider potentiellement dans n’importe quelle région du monde soulève également la question de la concurrence internationale qu’une telle situation pourrait impliquer. La Direction générale du Trésor considère néanmoins que cette concurrence est à relativiser dans la mesure où, malgré sa dimension pratique, le télétravail peut générer des coûts non négligeables pour une entreprise, par exemple en ce qui concerne l’administration et le recrutement. La concurrence internationale serait également limitée par des difficultés tenant à la coordination, à l’instar de la gestion du décalage horaire ou des différences culturelles.

Des effets positifs sur l’environnement ?

Le fait que le télétravail permette aux salariés de se soustraire à l’obligation de se rendre sur le site de leur entreprise conduit plusieurs études scientifiques à estimer qu’une application importante de ce procédé contribuerait à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

C’est notamment le cas de l’étude relative à l’évaluation de l’impact du télétravail et des tiers-lieux sur la réduction des consommations d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre et sur l’organisation des entreprises publiée par l’Agence de la transition écologique (ADEME) en 2015.

La Direction générale du Trésor souligne toutefois que le télétravail pourrait également avoir des effets négatifs sur l’environnement. En effet, l’augmentation du travail à distance pourrait être assortie d’une intensification de l’usage du numérique, lequel est actuellement responsable de 4% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

Sources : 


http://www.oecd.org/coronavirus/policy-responses/les-capacites-en-termes-de-teletravail-peuvent-entrainer-des-couts-de-confinement-differents-selon-les-territoires-08920ecf/
https://www.tresor.economie.gouv.fr/Articles/e498785a-85c7-4f1c-a43c-7e91d5c0841c/files/1c78380a-82ac-43ad-88d4-1f60430cf2cf
https://www.ademe.fr/evaluation-limpact-teletravail-tiers-lieux-reduction-consommations-denergie-emissions-gaz-a-effet-serre-lorganisation
https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/guide-pratique-face-cachee-numerique.pdf